LA CANCIО́N - J BALVIN & BAD BUNNY
Photo: Oasis - J Balvin & Bad Bunny (2019)
Légèreté, délicatesse, nostalgie : tels sont les premiers adjectifs qui me viennent en tête lorsque j'évoque « La Chanson ». Issue de l'album OASIS (2019), produit en commun par les deux superstars latino-américaines J. Balvin et Bad Bunny, La Canción évoque un thème récurrent et catchy de la musique pop : celui d'un amour qui nous a marqué, cette belle fille avec qui ça n'a pas marché.
Ils croyaient l'avoir oubliée, mais il a pourtant suffi d'une note pour que ce doux visage leur revienne en mémoire.
Bad Bunny, d'origine portoricaine, et J. Balvin, d'origine colombienne, composent pour la première fois un album commun. Ce duo avait d'abord émergé à l'international avec le hit I Like It, un remix explosif (comptant notamment Cardi B) d'un morceau des années 60 de Pete Rodriguez, 1 Like It Like That.
Grâce à cet album, ils ont par la suite chacun consolidé leur stature internationale. J. Balvin, musicien prolifique depuis plusieurs années, participe à l'essor progressif du reggaetón de la fin des années 2010, tandis que Bad Bunny s'impose de plus en plus comme une figure importante de la scène internationale (position qu'il n'a fait que renforcer dès lors).
Personnellement, les cuivres et le piano que l'on entend derrière les paroles me font le même effet: ils me hantent, tellement léger, à la fois proche et distant. Ils surgissent parfois dans ma mémoire et me rappellent tout: cette chanson, cet album, mais aussi ce rythme. Une ambiance intimiste, calfeutrée mais puissante et résonnant avec force.
Avec un usage bien fait de la réverbération, on passe d'une simple chanson d'amour à une œuvre puissante et imposante, clairement définie dans ce qu'elle est (un hymne à l'amour) et ce qu'elle veut (demander pardon).
Le souvenir simple d'une chanson partagée à deux, certes éméchés mais heureux, renforce l'émotion du souvenir. Celui d'un moment unique, celui de deux personnes en symbiose, vivant à part dans leur propre monde. Cette réminiscence, à la fois douce et amère, évoque le thème de la saudade, chère à Cesária Évora. La saudade est un terme portugais qui désigne un sentiment nostalgique, mêlé de tristesse et d'amertume, celui d'un souvenir heureux mais passé que l'on ressasse sans fin.
La faille personnelle est ici grande ouverte : on peut prétendre avoir oublié son ex, continuer comme si de rien n'était. Mais, dans le fond, certains cherchent seulement à combler un vide. Tels des fruits tombés de l'arbre, ils s'assèchent, finissent par errer, l'esprit sombre, le cœur vide.
C'est normal, ils ont perdu leur source de vie.
Finalement, cette chanson résume assez bien toute l'essence de la musique. La (bonne) musique, c'est une histoire de ressentis, d'émotions intérieures. Ici, elle les met à nu : la tristesse, le regret, l'incompréhension, jusqu'à en devenir fou.
La saudade version latine, ça donne cela. Et c'est plutôt agréable.
Encore merci, Benito et José.
Un Article de David Morais Rodrigues